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Rosa Morena / Paris / 05-07-99


Pour le texte qui suit, le traducteur tient à préciser que son travail n’est qu’une première version hâtive, exigée par l’éditeur, qui lui insiste pour qu’apparaisse son ©. Voilà qui est fait.

“... bien au delà de la 12ème cataracte, là où le fleuve hésite à être fleuve. Le voyageur - mais est-ce encore un voyageur - traversera trois déserts,
le rouge, qui n’est que poussière,
le blanc, qui n’est que le lumière,
le vert, qui est le plus bruyant.

Aux portes du premier, des hommes dont il ne comprendra pas les paroles, attendront que l’astre du jour soit au plus haut pour marquer dans la poussière la trace de son ombre. Le soir ils amèneront un chameau chargé d’eau et de dattes, le placeront dans la direction opposé au dessin de son ombre et se retireront.

Quand le chameau sera tombé d’épuisement, le jour se lèvera sur une immense plaine, blanche et brillante, qui tremble à l’horizon.
Le voyageur attendra tout le jour.
Le soir, trois hommes dont il ne verra que les yeux à travers les étoffes le rejoindront.
L’un le couvrira d’un voile lourd, noir d’un côté, blanc de l’autre.
Un autre nouera à ses pieds des sandales de cuir.
Le dernier lui montrera une étoile à l’horizon qu’il n’avait jamais vu.
Quand vers midi l’ombre le précèdera, l’arbre devant lui ne sera pas une illusion.
Le vieillard muet qui l’y attend non plus.
Qui lui remettra un long couteau plat, tranchant sur un seul bord, et un bol, d’or. Son regard s’élèvera pour suivre un instant, très haut dans le ciel, la multitude d’un vol d’oiseaux.
Il refermera les yeux.
Quand les cris seront derrière lui, le voyageur verra la montagne.
Il l’escaladera pendant encore deux jours, l’aube du troisième
lui éclairera le lac bleu qu’elle renferme, et le nuage blanc qui flotte au dessus, sans sortir du cratère.
Le nuage qu’il cherchait.
Il le contemplera longtemps.
Il croira son âme en repos.
Un matin, l’eau du lac se troublera, des vagues apparaîtront, le nuage se fera noir, l’air de souffre, exaspéré.
Il y aura un éclair dans ce qui sera devenu la nuit.
Il recueillera la pluie dans le bol.
Il boiera la pluie.
La pluie qui devait effacer le goût de l’amertume.
Mais elle sera plus amère encore.
Il appelera la lune, sa sœur. Elle se sera retirée.
Sa tristesse sera immense.”

Papyrus d’origine inconnue, classé A-154-EF-338 dans le département des archives du Musée du Caire.